Croissance personnelle·Fil d'arrivée

Carburer au défi

neige

Préambule

En décembre dernier, Mimi (une amie coureuse) m’a mise au défi de courir 5 kilomètres par jour pendant tout le mois. Puisque la nuit porte conseil, j’ai dormi sur la proposition, puis j’ai décidé de le relever. À vrai dire, ce challenge arrivait pile au bon moment. Depuis le début de l’automne, mon énergie physique figeait en même temps que le mercure grimpait et mon entraînement de course à pied en subissait les contrecoups. Trouvant cette idée tout à fait géniale, j’ai ensuite proposé à mon tour le défi à Zone course (un groupe de motivation à bouger), puis Vicky et Shirley se sont ajoutées à l’équipe des Filles Full Crinquées (FFC), le nom humoristique auquel nous répondions pour l’événement. Ensemble nous nous sommes donc mises à l’épreuve et encouragées quotidiennement via facebook.

Cette aventure s’est avérée un franc succès et une bénédiction incroyable. En plus de me propulser dans l’action, de m’obliger à maintenir le focus sur l’objectif, de me fortifier physiquement, de garder l’œil sur mon poids en ascension entre le buffet royal de noël et les bouchées festives du jour de l’an, cela m’a permis de créer des liens avec les FFC, ou de les resserrer, de même avec le groupe de coureurs. Depuis cette expérience, la mise au défi s’est instaurée à Zone course et de plus en plus de membres répondent à ces appels, comme quoi carburer au défi est une expérience tout à fait stimulante. Faut dire que les résolutions du nouvel an et la culpabilité face aux abus du temps des fêtes nous fait bouger plus facilement. Foutu malaise!

 Lorsque la motivation personnelle est vacillante, plutôt que d’hiberner ou de s’enfoncer plus creux dans son terrier, quoi de mieux que de relever un défi pour stabiliser son énergie de réalisation? Orgueil ou esprit de compétition, ne vous êtes-vous jamais questionnés à savoir pourquoi le défi titille tant votre force motrice au point d’affronter les températures glaciales de l’hiver, de se lever aux petites heures du matin ou de prioriser un défi parmi tous les dossiers si « urgents » de sa vie? Chers lecteurs, dans cet article nous découvrons pourquoi le défi nous motive tant à l’action. Combien d’entre vous liront cet article? Je vous mets au défi!

Cours ou crève

«En ce moment, beaucoup de gens ont renoncé à vivre. Ils ne s’ennuient pas, ils ne pleurent pas, ils se contentent d’attendre que le temps passe. Il n’ont pas accepté les défis de la vie et elle ne les défie plus.» Paulo Coelho

Le défi est un concept à la mode. Il est utilisé pour nous inciter à toutes sortes de choses et à ne pas nous éteindre. Comme nous tous, grâce au défi j’ai affronté une série de Goliaths. J’ai cessé de fumer la cigarette, perdu du poids, écrit des livres, créé un blog, couru le demi marathon, puis le marathon et je reporte encore cette année mon dossard de marathonienne question de maintenir mon titre. Besoin de réalisation? Oui. Esprit de compétition? Oui. Orgueil? Aussi. Bien placée? Voyons cela.

Selon CNRTL[1], le défi est l’action de provoquer un combat, d’affronter quelqu’un ou quelque chose. Le défi de courir 155 km en décembre était une épreuve sportive menée contre l’inaction (ou pour nourrir son besoin de bouger) en toute solidarité avec les FFC. Le contexte était plutôt sympathique, c’est-à-dire qu’il encourageait le respect de ses capacités, de ses conditions, de ses préférences, de ses limites et privilégiait le plaisir plutôt que viser battre l’autre (sa vitesse et sa rapidité) ou,  comme le guerrier, à valoriser la souffrance de l’expérience. Toutefois, je dois vous avouer qu’à quelques reprises je me suis surprise à emprunter le modèle de la compétition pure et dure, vous savez du genre à la «cours ou crève».

Eh oui, à ma grande surprise mon Brutuce intérieur (mon ego) est apparu au beau milieu du défi. C’est qu’il s’est mit à comparer la valeur d’une course sur tapis à celle accomplit dans le «frète» de l’hiver, puis à accorder moins de mérite à la première. De nature frileuse, je privilégie la course sur le treadmills lorsque les conditions hivernales transforment l’exercice en un sport extrême. Il faut le dire que du style «moumoune», il ne m’en faut pas beaucoup pour abdiquer; je dirais tout ce qui est en dessous de -10 degré Celsius combiné à une accumulation de neige au sol est suffisant. Devant la bravoure de mes amies coureuses, que j’admire beaucoup pour leur détermination à courir dehors peu importe les conditions, Brutuce me pressait à en faire autant sans égard à mes préférences de coureuse douillette-zen. Bref, je me suis mise à valoriser le lieu de la course plutôt que le défi en tant que tel. Brutuce était aveuglé par la compétition.

C’est suite à une course où, frigorifiée, j’ai presque laissé ma peau se figer dans un bloc de glace (!!!) que je me suis dit «Mais c’est quoi cette affaire-là? J’ai le droit de ne pas courir dans ce froid. Après tout, n’ai-je pas la chance de posséder un tapis à la maison justement pour faire face à ces situations et éviter de me placer dans des conditions qui m’enlèvelunette pivoine 226 tout plaisir à courir.» Alors, dans le cadre de ce défi pourquoi considérer cette possibilité comme un handicap plutôt comme un privilège? Au fond, chaque option comporte ses avantages. Ce coup de fouet a fait émerger mon vieux sage intérieur (le Soi). Il m’invita à réfléchir à ceci : « La voie pour savoir qui vous êtes n’est pas celle de la comparaison. Voyez plutôt si vous accomplissez vos propres potentialités en y mettant toute votre bonne volonté. » (Rajneesh). Ma recherche d’harmonie avec Soi m’a donc remis dans mes propres souliers qui sont uniques et incomparables. Chacun de nous le sommes et c’est ce qui fait la richesse de ce monde. Personne n’est plus ou moins et chacun gère ce qu’il est, sa lumière comme son ombre et vit selon ses goûts et aspirations. Voilà qui  ajusta l’expérience à mes propres préférences et à qui je suis, c’est-à-dire ce pourquoi je participais au défi. S’il est inutile de se comparer ou se mesurer à l’autre, je me suis alors interrogée à savoir à quoi pouvait bien servir l’esprit de compétition?

Chère compétition

«En compétition, il y a toujours un premier et un dernier, mais l’important est de ne pas être le second de soi-même.» Luis Fernandez

Évidemment, il y a une distinction à faire entre se comparer et se mesurer, et lors d’un défi on se mesure à quoi au juste? On peut se mesurer à soi, à ses capacités et limites afin de chercher à les dépasser. Toutefois, en présence de d’autres personnes, nous ne pouvons pas nier la tendance que nous avons parfois à se mesurer à autrui, comme l’a justement fait Brutuce dans le cadre de cette expérience. Nos pairs deviennent par le fait même des « concurrents ». De ce point de vu, même dans un contexte amical comme celui où se déroulait le défi des FFC, il est facile de se placer dans une situation de compétition. Est-ce que c’est justement cet aspect qui nous stimule et nous fait sortir de notre zone de confort? Je crois que oui et que tout est question de dosage.

Que ce soit dans un esprit convivial ou strictement compétitif, c’est en se mesurant à nos « adversaires» » qu’il est possible d’identifier nos forces, nos faiblesses ainsi que les objectifs à viser. C’est à partir de cette information qu’on peut ensuite chercher à s’améliorer et à battre ses propres records. Mais le piège c’est de se prendre trop au sérieux et à viser la réussite à tout prix. Il est alors facile de dépasser la pensée des champions (qui se nourrissent de la compétition pour atteindre l’excellence) en adoptant des comportements enracinés dans l’ego qui, disons-le, peuvent parfois devenir extrémistes. Pensons à ceux qui sont prêts à écraser tout ce qui se trouve sur leur chemin pour démontrer leur supériorité, ou encore, à ceux qui ignorent les signaux de leur corps valorisant la douleur et les cicatrices comme une démonstration de leur puissance. On sort de l’amical pour entrer dans la jungle! Dans un tel contexte, on perd alors le plaisir à s’accomplir, ce qui ternit l’expérience.

 Bref, tout dépend du caractère du défi et de la couleur qu’on lui donne. Est-ce une compétition formelle ou bien un exercice de stimulation favorisant l’entraide? Évidemment, le défi des FFC se situait du côté de la motivation à l’action et de la solidarité. Or, je me suis questionné à savoir si ce qui distingue le défi (dépasser nos propres limites et consolider nos forces) d’une compétition (se mesurer à ceux des autres) était-ce l’orgueil?

 Orgueil

 «Le comble de l’orgueil, c’est de se mépriser soi-même.» Gustave Flaubert

 L’orgueil est le fait de se juger supérieur aux autres, soit meilleur. L’ego adore! Dans la situation du défi des FFC, mon ego s’est carrément senti inférieur en comparant la course sur neige à la course sur tapis, moi qui privilégiais le tapis tout en ayant à la fois l’objectif de continuer à courir dehors l’hiver, mais pas à tout prix. Pauvre petit Brutuce! Comme vous le savez, cela m’a donc incité à courir dans des conditions que je jugeais au-dessus de mon échelle de «l’acceptable», soit ce avec quoi j’étais en harmonie (respecter mon corps et mes préférences); je dépassais ma zone de confort pour entrer dans un terrain périlleux dominé par l’orgueil. Heureusement que mon maître zen m’a remis dans le droit chemin en affirmant vis-à-vis de moi-même mes propres buts, en réitérant mon sens de l’engagement pour ce défi, de la fidélité à soi et l’honneur.

À partir de ce moment, j’ai décrété -17 degrés Celsius température plafond qui sépare la course extérieure et intérieure, de toujours donner préséance à mes propres objectifs et à faire de mon Soi (et non l’ego) mon centre décisionnel peu importe la situation. Brutuce peut donc aller se coucher ou bien agir à titre de chien de garde au cas où je me ramollirais un peu trop! Certes, il faut une certaine dose d’orgueil, mais juste assez pour sentir les forces bienfaitrices du challenge se mouvoir en soi, notamment pour garder sa motivation à relever un défi et accomplir ses aspirations. Autrement, cela ne serait pas un défi n’est-ce pas?

Ainsi, le défi et la compétition apportent bon nombres de bienfaits. Se serait plutôt notre attitude qui rendrait l’expérience enrichissante ou désagréable. Pour retirer le meilleur de l’expérience, il nous faut alors négocier avec soi-même les périmètres dans lequel a lieu l’expérience et surveiller notre ego afin d’éviter qu’il ne récupère l’exercice en s’adonnant à la comparaison ou en se gonflant d’orgueil pour faire briller ses souliers; il adore le bling-bling! Au final, si la nature de l’expérience est la compétition qu’il en soit ainsi. Et si c’est plutôt le plaisir et l’entraide? Alors qu’il en soit également ainsi.

Viser la  réussite

«Il n’y a qu’une réussite : pouvoir vivre comme on l’entend.» Félix Leclerc

Lorsque le défi permet de faire ressortir le meilleur de soi, la réussite se trouve dans l’atteinte de nos objectifs personnels. Avons-nous fait de notre mieux? Avons-nous accompli nos propres potentialités? Avons-nous poussé nos limites? Avons-nous été fidèles à nous même, respectueux de soi-même et de son corps? Voilà la somme des bienfaits de se mettre au défi.

Pour conclure, je dois dire que j’apprécie les défis, car ils me poussent vers l’avant. Ils m’amènent toujours plus loin dans l’art de courir comme celui de vivre. Le fait de me mettre en situation de compétition, de me mesurer aux autres, me sort de ma zone de confort et revigore mon énergie vitale. Mais ce qui me satisfait plus que tout, c’est le fait de rester fidèle à moi-même et de réaliser des expériences qui me font aimer ma vie et ce que je suis. Je tiens à remercier les FFC pour leur contribution à mon développement en tant que coureuse, pour le soutien dans l’effort et, particulièrement, de m’avoir encouragé à apprivoiser la course hivernale. Merci à Mimi, qui centrée, m’a aidé à remettre Brutuce à l’ordre, surtout lorsqu’elle a complété le défi les deux pieds dans le sable! J’adore sa vision de la vie. Un coup de chapeau à Vicky-la-vaillante pour sa bravoure devant le frète de l’hiver; Elle a sûrement des gènes communs avec Мороз (le dieu de l’hiver et du froid). Et une mention d’honneur à Shirley pour avoir choisi d’honorer son corps et de remodeler le défi à ses propres objectifs. Tu as mon plus grand respect ma chère. Un gros merci également au groupe Zone course pour tous les coups de pouce offerts en cheminant vers la réussite de ce défi avec les FFC.

Chers lecteurs, je vous invite à vous mettre en situation de défi afin d’aller au-delà de vos rêves et de vivifier votre corps-cœur-tête et esprit. Jetez, portez, acceptez et répondez au défi, ceux que vous vous poserez à vous-même comme ceux que la vie vous proposera, car  carburer au défi, c’est se sentir vivant!

À bientôt!

 


[1] Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales.

2 réflexions sur “Carburer au défi

  1. Merci Martine pour ce très beau billet. L’expérience FFC a été formidable pour moi. Elle a fait en sorte que je retombe en amour avec la course. Courir la distance, sans un objectif en temps à fait la job ! Mon orgueil m’a fait me lever à 5h du mat et sortir dans le froid, les tempêtes et la noirceur de décembre. Mon orgueil mais aussi le fait d’avoir donné ma parole. D’avoir dit (écrit) que je le ferais, de m’être engagée, de m’être affichée, de devoir rendre des comptes ça aide à se sortir du lit quand les draps chauds sont t-r-è-s inistants. Tout ça mais aussi j’y allais parce que je savais que mes trois autres FFC iraient, elles…encore l’orgueil ! Mais aussi parce qu’on était les quatre là-dedans et que je savais que j’allais trouver l’encouragement nécessaire. Tout comme toi, je ne suis pas une fille des grands frettes. Preuve, je me suis sauvée vers le chaud soleil de la Floride et c’était ben correct de finir mon défi là-bas. Courir sur le tapis ou dehors, tu le sais j’ai ma préférence et je l’ai dit tout le long du défi: on fait un défi, personne a dit qu’on devait le faire en souffrant. Je t’ai quand même envié à plusieurs reprises d’avoir un tapis volant (d’ailleurs, il est donc ben beau !) tellement que je me suis inscrite au centre sportif pour pouvoir m’entrainer de façon sécuritaire pour le reste de l’hiver. Tu as une belle candeur de parler ouvertement de ton Brutuce (tu l’as bien apprivoisé) et du défi que tu as rencontré à travers le défi des FFC. Les défis, qu’ils soient planifiés ou impromptus, ont le don de nous mettre la vérité en face ! Merci pour ton encouragements, ton soutien et, malgré un Brutuce qui te parlait dans le creux de l’oreille, merci d’avoir toujours été souriante dans tes propos. Ce défi, je l’ai adoré et je l’ai adoré surtout parce que j’ai rencontré (virtuellement) des coureurs de tout calibre, passionnés et parce que je t’ai mieux connu toi !

    1. AH! Mimi, comme ce commentaire est gentil. J’ai beaucoup apprécié entreprendre ce défi avec toi. La course est un terrain fertile à la découverte de soi. Parfois c’est surprenant tout ce qu’elle peut révéler et chaque occasion permet d’apprivoiser son ombre. Une fois qu’elle est mise en lumière, elle prend une dimension plus humaine qui nous porte du côté de l’humilité qui ouvre sur sa sagesse intérieure. Alors on peut mieux y voir clair et continuer à évoluer avec son Brutuce et son maître zen pour vivre en harmonie avec soi, à tout le moins essayer!!! 🙂

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